L’étude de Wetechcare « L’inclusion numérique un investissement rentable » évalue que pour toucher l’ensemble des publics en demande d’accompagnement, il serait nécessaire de mobiliser plus de 26 000 aidants tout en formant plus de 10 000 acteurs sociaux. Salariés de la médiation numérique, bénévoles dans les associations de quartier, professionnels de l’accompagnement social ou encore services civiques, les options sont nombreuses. Nous avons voulu recueillir le point de vue de plusieurs acteurs clés directement concernés.

 

ENTRETIEN AVEC EMMAÜS CONNECT

Les Cahiers : Vous avez accompagné 32 000 personnes en 5 ans. Comment changer d’échelle et répondre aux besoins de millions de français ?

Emmaüs Connect : Aujourd’hui, nous sommes présents dans 8 villes de France et nous pourrions ouvrir quelques espaces supplémentaires. Toutefois, pour changer d’échelle, nous misons sur le développement de plateformes d’apprentissage en ligne et sur la mise en capacité des accompagnants. Après avoir reçu les publics exclusivement dans nos espaces de solidarité numérique, nous agissons désormais au plus près des publics chez nos partenaires sociaux. Nous formons les professionnels sociaux à l’accompagnement numérique et nous les outillons avec des contenus pédagogiques afin qu’ils développent des ateliers à destination de leurs publics.

A titre d’exemple les missions locales aident les jeunes à prendre en main le numérique dans la recherche d’un emploi et l’accès à leurs droits. De leur côté, les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), favorisent la prise en main du numérique pour aider les séniors à  sortir de l’isolement.

En complément, nous concevons et déployons des plateformes d’apprentissage en ligne, Les Bons Clics et Clicnjob, qui proposent des contenus pédagogiques de formation au numérique et de découverte des services en ligne clés, le tout visant à favoriser l’insertion des publics fragiles.

Enfin notre changement d’échelle passera par la construction d’une communauté d’aidants qui s’engagent sur tout le territoire. Tous les jours des centaines de bénévoles et de services civiques accompagnent les premiers pas de publics très éloignés du numérique chez Emmaüs Connect et leur rôle est fondamental dans nos actions.

LC : L’Angleterre a réussi à mobiliser des centaines de milliers de bénévoles sur ce sujet. Cela vous semble-t-il possible et souhaitable en France ?

Au regard du nombre de français à aider, l’engagement bénévole est un moyen d’agir massivement. L’idée n’est pas de demander aux bénévoles de faire la même chose que des accompagnants professionnels mais bien de prendre en charge les « premiers pas numériques » des publics en difficulté.

 

Le bénévolat fonctionne très bien chez Emmaüs Connect pour autant que l’on soit attentif à leurs besoins de formation et que nous prenions soin de leur encadrement. L’action de nos bénévoles se concentre sur des missions d’accompagnement ponctuelles plus accessibles que des missions de formation qui demandent des compétences avancées et une disponibilité forte.

Monter un programme national de recrutement d’aidants numériques bénévoles nécessite un plan de formation bien défini, accessible facilement et qui garantisse une qualité d’accompagnement homogène. Une autre exigence serait l’animation des communautés d’aidants en lien avec les acteurs locaux dans les territoires.

Nous ne voyons rien d’impossible à s’inspirer de cette initiative britannique pour autant que l‘on sache l’adapter à notre contexte national. Nous pouvons déjà le faire à l’échelon local, nous travaillons en ce sens.